J'avais moins le sourire, le soir précédent, soit seulement quelques heures auparavant. Dans l'après-midi, je venais de quitter la base navale, quand l'image du plan d'eau m'est revenue à l'esprit. Bon sang, ce port n'est pas en eau profonde ! Jamais le VAR va pouvoir accoster ici. Retour à la base navale. C'est bien le cas. Son commandant me dit qu'il ne peut rien faire pour moi. Son autorité est limitée à ce port.
Je fonce au port de commerce. Le directeur refuse recevoir « mon » bateau. Toutes les places sont déjà retenues. Au mieux, il peut me permettre de venir à quai pour le cocktail du soir, mais faudra être reparti sitôt après car un navire est attendu à cet emplacement.
Je suis mal, très mal. Je suis seul, loin de la capitale et la nuit est tombée. Demain matin Alindien arrive et je ne vais pas avoir l'air malin s'il ne peut accoster. La nuit tous les chats sont gris et la fin justifie les moyens (à condition que ça marche, sinon gare aux coups de bâtons). A deux heures du matin le problème est solutionné.
Lors des manœuvres d'accostage, l'ECPA local filme toute la scène. L'opérateur est surtout obnubilé par l'aspirant féminin qui va et vient à la passerelle et accessoirement par mon épouse aussi d'ailleurs (comme j'ai pu le voir sur la copie de la cassette qui m'avait été offerte). Cette demoiselle, polytechnicienne, fait son « service militaire » à bord duVAR. Depuis elle a fait du chemin, maire, députée, ministre, elle est aujourd'hui candidate déclarée à la présidence de la République.
Les détails de l'escale sont dans ma sacoche, résultat de longs palabres. L'amiral, qui va être reçu par le Président, part pour la capitale sous escorte blindée (certains de nos invités au cocktail se sont fait tirer dessus sur la route. Nous sommes au Yémen, ne jamais l'oublier). Moi je reste sur place.
Premiers permissionnaires à l'appel. Je suis appelé à la coupée. L'officier d'immigration a tracé un trait à la craie au pied de la coupée : personne ne doit franchir cette ligne car personne n'a de visa pour entrer au Yémen. Bon, le navire est là, mais j'ai encore du boulot.
Coup de chapeau au président des OMS (un major fourrier) qui nous a régalé, mon épouse et moi, de charcuterie
et de rosé (étant loin de la capitale, je m'étais permis de revêtir mon uniforme pour le cocktail)
denrées qui n'avaient pas figuré à nos menus depuis longtemps,sans oublier le commis qui nous en avait fait une petite cession au moment de partir.
Le VAR ? Un excellent souvenir