Les années 50 c’est encore l’époque des manœuvres navales.
La guerre froide avec le bloc communiste, laisse planer le doute et la crainte d’un nouveau conflit.
Côté marine, des manœuvres de printemps rassemblent en Méditerranée des bâtiments de l’OTAN.
Contraintes d’exercices mais aussi, escales et permissions dans des ports étrangers.
Beaucoup moins prisées, les campagnes d’automne en Atlantique nord au large des côtes britanniques.
Là-haut, c’est la brume, le crachin, voir les coups de tabac continuels, pour ne pas dire perpétuels !
Les gens du nord y sont habitués !
En Méditerranée, chez nous, comme disent les toulonnais, c’est plus soudain ! ça roule pas mal, les lames de fond, mais on peut tabler sur quelques jours, pour voir de nouveau réapparaître le soleil.
En mai 53, le Sakalave se joint à une partie de l’escadre envoyée à présenter les hommages de la France au couronnement de Reine Élisabeth II.
Ensuite, exercices au sein du GASM et escales en Méditerranée se succèdent.
Nous naviguons de concert avec le Bambara (chef de file).
Casablanca, Alger, Bizerte, Naples, les escales et les permissions de détente sont les bien venues !
Nos ennemis les plus chers avec lesquels nous jouons à cache-cache sont les sous-marins : "Créole", "Millé", "Africaine", "Roland Morillot", "Sirène", "Saphir", etc… que nous retrouvons, complices, dans les bars de la côte, quand arrivés en fin de semaine nous relâchons, sur corps- mort, à Juan-les-Pins, Golfe-Juan, Nice ou encore l’incontournable Villefranche-sur-Mer.
En mars 54 le D.E. ayant besoin d’un sérieux toilettage, il fut décidé une campagne de plusieurs mois de carénage aux ateliers et chantiers de Sidi-Abdallah (Tunisie), dont voici un historique tiré du journal de bord.
J’y consigne « observations et mouvements » dans le service ordinaire de semaine (S.O.), certains pouvant s’y retrouver.
- Spoiler:
- Les 2 et 3 mars sont jours de préparatifs de départ.
Le temps est clair, le vent est pratiquement nul et la température de 13 à 15°.
Le journal d’observation note quelques mouvements dans la rade : Le "Hoche" et le sous-marin "Artémis" appareillent.
Tandis que le BDL."Richelieu" rentre au mouillage, suivi des "Gloire"et "Montcalm".
Le 5 est jour d’appareillage.
À 17h45 l’équipage est appelé au poste de manœuvre, le Pilote monte à bord.
Appareillage à 18h05.
18h20 l’équipage rompt du poste de manœuvre.
Le 1er tiers monte à la mer, et au poste de navigation.
Nous bénéficions d’une mer calme, d’une légère brise et d’une bonne température.
Le L.V. Mesnard (off. d’artillerie) prend le commandement.
Puis c’est le ronronnement des machines qui donnent ce qu’elles peuvent.
Les tiers et quarts se succèdent, à la navigation et à la veille.
Le 7 à 00h23 nous mouillons 4 maillons devant Bizerte.
À 08h00, l’ancre est amenée.
La journée s’annonce belle, avec un ciel dégagé, une brise légère et une température déjà chaude 18°.
La passe est franchie.
À 08h45. nous sommes à pied d’œuvre !
Le 9 mars débute le débarquement des munitions du bord.
Dans la matinée le Pacha du "Georges Leygues"rend visite à nôtre commandant.
La corvée de munitions se termine en fin d’après-midi.
Les 11 et 12 mars nous faisons mouvement à différents appontements : Quai 3 nord, puis au quai 2 sud.
Le 14 est un dimanche.
Inspection de tenue des permissionnaires par l’officier de garde.
Durant la semaine qui suit, sont présents à Sidi-Abdallah : le remorqueur de haute-mer "Mameluk", le D.E. "Arabe", le pétrolier la "Baïse" le croiseur "G.Leygues" l’aviso La "Moqueuse" et le chasseur "Dalhia" CH. 537.
Le 22 mars, belle journée ; ciel dégagé, légère brise, 17°.
L’artillerie du "Sakalave" 76 m/m, 40 Bofors et 20 m/m est débarquée par les ouvriers de l’Arsenal.
Les 26 et 27 mars se tient un conseil d’avancement pour le 1er, 2ème et 3ème tiers de l’équipage.
Les jours suivants, tandis que le bateau n’est plus qu’un chantier pris d’assaut par les ouvriers de l’arsenal, l’équipage va participer à un entrainement de surveillance sur les hauteurs de Ferryville (Karouba et Sidi-Amed), qui dominent les rades de Bizerte et Sidi-Abdallah.
Ces exercices de simulation sont baptisés « Shield-One ».
Ils vont s’étendre jusqu’au 1er Avril.
Le 29 mars nous sommes réveillés à 04h45, prêts à partir pour un premier exercice de surveillance.
La météo. relevée à 07h00 mentionne un plafond bas ; C 9/10, une légère brise, 17,2°.
Les 6 et 7 avril, nous participons à des exercices de tirs à armes légères, ainsi qu’à la formation de sections de débarquement.
Le 31 mars, le journal de bord mentionne un début d’incendie sur le CT "Triomphant", qui a fait mouvement dans l’après-midi.
Déclaré à 22h45, l’incendie est maitrisé à 23h15.
Le 8, les cuves à mazout sont entièrement vidées. le "Sakalave" entre au bassin le 10 à 07h40.
Il est sur cale-sèche à 12h40.
À 13h30 le bord est évacué, l’équipage prend subsistance à terre.
Mouvement dans le port du 20 au 23 avril : Le DE "Arabe", essais en mer après révision (carénage), le Patrouilleur "Mameluk", le croiseur léger "Triomphant", la citerne d’eau douce "Lac Tonlé-Sap", le DE "Bambara", et le "G.Leygues".
Le 16 juin le "Sakalave" quitte le bassin.
Commencent les éssais en rade et au mouillage.
Le 30 juin l’équipage est appelé au poste de manœuvre.
À 06h45 la passe de Bizerte est franchie.
Le service météo de Karouba annonce une couverture marine 9/10 Ouest Tunisie, formation d’un faible minimum entre Sicile et Sardaigne, vent secteur Nord-Ouest de 10 à 20 nœuds, à mer agitée.
Sur "Marine Magazine" (Marine Édition) n° 40 (juillet 2005), j'ai fait un article de mes souvenirs sur ce D.E. " 14 mois passés à bord…" avec quelques anecdotes teintées d'humour.
C.L.