au lieu-dit : Le Passage
- Spoiler:
Il évitait le grand détour par Landerneau et le pont de Royan
( première traversée possible sur L'Elorn et un des dernier pont habité du monde .)
Avant le bac, le Passage de Brest vers la Cornouaille se faisait au même endroit mais d'une cale beaucoup plus étroite.
(A voile ou plus souvent à l'aviron, le vent dominant étant plein travers.)
Quelques personnages célèbres l'ont emprunté dont:
- Eugène BOUDIN, l'un des peintres précurseurs de l'impressionnisme et grand spécialiste des "marines".
140 ans et deux ponts plus tard, la perspective est la même.
- Gustave FLAUBERT, auteur de "Madame Bovary" ou de "Par les champs et par les grèves" dont voici l'extrait de la traversée du "Passage".
" De Plougastel au bord de la mer on dévale au milieu des bois par une pente rapide d'où l'on découvre une partie de la rade, celle du moins qui s'étend depuis Brest jusqu'à la rivière de Landerneau.
A vos côtés se dresse une falaise de rochers blancs rayée horizontalement par des couches de silex à pic et nue du côté des flots, mais par derrière, sur le plateau, couverte de chênes et de hêtres, surchargée de feuillages, et qui, lorsque vous descendez par le vallon entrouvert dans son flan est d'une crâne tournure.
Ici l'on s'embarque, on s'évite aussi, comme à Landévénnec, de décrire le circuit de l'anse, les découpures inégales de la rade s'avançant dans les terres en mille golfes capricieux dont il faudrait quelquefois toute une journée pour en faire le tour.
... cependant le batelier nous attendait, la marée était haute, il fallait partir.
Les vagues sautaient sur le pavé de la cale où le bateau bondissait en cognant sa quille, leur écume rejaillissait sur les passagers qui s'embarquaient, une casquette tomba à l'eau et les bottes de M. Genès furent mouillées.
La mer roulait, la brise était forte. Cahotée par les flots et tourmentée par un vent de nord-ouest qui poussait au fond de la baie, la lourde chaloupe n'avançait guère. Pendant le temps qu'on ramenait les avirons, elle se levait de l'avant et pivotait, arrêtée sur la pointe des vagues. Elles étaient blanches à leur crête, vertes dans les courbures, bruissantes, nombreuses et se poussaient l'une sur l'autre avec un délire folâtre. Un brick devant nous, qui prenait des bordées, passait les voiles pleines, bouffi de vent, arrondissant son ventre et s'en allait doucement coupant l'eau qui clapotait contre sa carène...
A mes pieds par terre, au fond de la chaloupe était une cage d'oiseau qui contenait un merle pris le matin et qu'on apportait à la ville. A côté de la cage, par terre aussi, se cachant le visage de ses mains, une jeune femme était assise dans une attitude désespérée : elle sanglotait, elle priait Dieu, elle suppliait tout le monde de la sauver, elle jurait de ne jamais retourner à Plougastel..."