Lorsqu’en 2006 j’avais présenté un panorama (non exhaustif) des moteurs thermiques de l’antiquité à nos jours dans « LES HISTOIRES DE BONNERUE », j’avais consacré un chapitre aux turbines. La description, très générale, des différents types de turbines «méritait» plus de précisions, compte tenu du fait que les plus puissants des navires (porte-avions, bâtiments de ligne, croiseurs, escorteurs d’escadre et rapides) équipant notre Marine Nationale utilisaient majoritairement ce mode de propulsion. Aujourd’hui encore, notre P.A.N. « Charles De Gaulle », quelques frégates de premier rang, ainsi que tous nos sous-marins nucléaires, mettent en œuvre des turbines à vapeur dans leur appareil propulsif. De nombreux navires dont l’appareil moteur principal est constitué de moteurs diesel pour la navigation en régime «normal», utilisent en appoint des turbines à gaz pour atteindre leur vitesse maximum.
Durant les trente dernières années du XVIIème siècle, Denis PAPIN s’inspirant de travaux antérieurs, mit en pratique la force que pouvait exercer la vapeur d’eau en déplaçant un piston dans un cylindre selon un mouvement longitudinal limité. En refroidissant le cylindre, le piston redescendait, poussé par la pression atmosphérique «aidée» de la force de gravité. Il fallut ensuite imaginer la transformation du mouvement rectiligne alternatif en mouvement circulaire continu. Il réalisa une seconde machine destinée à remonter de l’eau pour alimenter des fontaines ornant les jardins des châteaux. Il eut l’idée d’utiliser cette machine pour pomper de l’eau qu’il faisait remonter et chuter sur une roue à godets, ce qui la faisait fonctionner comme un moulin à eau, obtenant ainsi la transformation en mouvement circulaire continu. Il construisit un bateau qui était propulsé par ce dispositif.
Il fallut par la suite adapter le système «bielle-manivelle» connu depuis le moyen âge (1430 environ). C’est James WATT qui réalise cette adaptation presque un siècle après les réalisations de Denis PAPIN. Dans la première moitié du XIXème siècle, à partir du moment où il fut décidé de mécaniser les navires, tout d’abord en appoint de la propulsion à la voile, le monde resta longtemps sur ce concept moteur pour faire tourner tout d’abord des roues à aubes, puis par la suite des hélices. Les machines à vapeur alternatives fonctionnant tout d’abord à basse pression et à simple effet vont, grâce à James WATT, évoluer pour fonctionner à double effet, à double voire à triple expansion, être de plus en plus puissantes et économes en combustible. Cependant, elles sont volumineuses et lourdes, occupant beaucoup de place à bord.
Pour obtenir directement un mouvement circulaire continu sans passer par le système bielle-manivelle, déjà, au IIème siècle avant Jésus-Christ, HÉRON D’ALEXANDRIE avait inventé une machine qu’il avait baptisé «Eolipile» (boule d’Eole) dont le mouvement s’apparentait à celui d’une turbine à vapeur à réaction, mais personne n’eut le trait de génie de l’utiliser pour créer une force motrice exploitable. On connaissait pourtant depuis longtemps le moulin à eau qui fonctionnait grâce à la force exercée par une chute d’eau sur les palettes (ou les auges) d’une roue à aubes. En se référant à un dessin de Denis PAPIN, on peut penser que c’est un dispositif similaire qui lui avait permis de motoriser son bateau : la chute d’eau naturelle étant remplacée par une machine à vapeur qui remontait l’eau retombant sur une roue à godets. Les technologies dont les gens disposaient alors ne permettaient pas encore de créer un système moteur utilisant directement la force d’un gaz sous pression, en l’occurrence la vapeur d’eau, pour faire tourner une roue à aubages, qui sera plus tard appelé « TURBINE ».
- Spoiler:
Héron d’Alexandrie (125 av. J.-C.) créateur d’automates mus par l’eau, s’intéressa également à la vapeur et à l’air comprimé. Héron d’Alexandrie était contemporain du pharaon Ptolémée VIII, bien que certaines sources le situent plus tard, au premier siècle après Jésus-Christ. Connu pour les machineries décrites dans son Traité des Pneumatiques, on lui doit par ailleurs un projet de machine destinée à ouvrir automatiquement les portes d’un temple. Sans le savoir, il fut le premier concepteur connu d’un moteur à vapeur, l’Eolipile, dont le mode de fonctionnement était celui d’une turbine à réaction. Il s’agissait d’une marmite remplie d’eau qui, chauffée, délivrait par l’intermédiaire de deux tuyauteries coudées formant axe de rotation, de la vapeur dans une sphère tournante munies de deux « tuyères » diamétralement opposées. La vapeur d’eau s’échappant sous pression des tuyères, engendrait par réaction la rotation de la sphère. Il aurait suffit d’équiper cette sphère tournante d’une poulie et d’une courroie, pour entraîner en rotation un mécanisme quelconque, tel un tour de potier par exemple.
Echelle de temps durant lequel s’est effectué le développement des machines à vapeur à pistons.
Après avoir inventé l’auto-cuiseur à vapeur, Denis PAPIN construit sa première machine à vapeur qui se résume à un piston (libre) se déplaçant dans un cylindre fermé aux deux extrémités, sous la poussé de la vapeur. Le cylindre fait également office d’évaporateur car c’est en chauffant le fond rempli d’eau que la vapeur est produite. Par la suite, au début du XVIIIème siècle, PAPIN part en Allemagne où il réalise un système à vapeur pour monter et stocker de l’eau destinée à alimenter des fontaines. Puis il construit un bateau propulsé par des roues à aubes mues par sa machine à vapeur. N’étant pas en mesure à l’époque de transformer le mouvement linéaire alternatif du piston de sa machine en mouvement circulaire continu capable de faire tourner des roues à aubes, il imagine de faire déverser l’eau pompée par sa machine sur une roue à godets qui entraînera les roues à aubes clavetées sur le même arbre. Son bateau fonctionnera, mais sera détruit par des bateliers traditionnels, inquiets de la concurrence qu’il aurait pu leur apporter. Personne ne peut dire précisément la manière dont était réalisé son mécanisme de propulsion. On ne peut que se fier au dessin réalisé de sa main et qui figure ci-dessous. Comme le montage peut être assimilé à l’utilisation d’une turbine à eau, j’ai dessiné, à ma manière, une animation montrant comment aurait pu fonctionner le dispositif. On se rend compte que beaucoup de manœuvres devaient être exécutées manuellement pour que la machine fonctionne et uniquement en marche avant.
1 - Clapet d'aspiration
2 - Clapet de refoulement
3 - Soupape de sûreté de la chaudière
Dernière édition par BONNERUE Daniel le Ven 8 Jan 2010 - 16:41, édité 7 fois