Voici les dernières nouvelles de la "Grande Dame" toujours
Nouvelles que l'on pouvait lire dans le journal Sud Ouest
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Des nostalgiques viennent encore régulièrement. Le périmètre autour du bateau est interdit, les accès au port sont réglementés. « C'est ma jeunesse, là » : Bastien Dupuis a fait le voyage de Nantes pour regarder « ma Jeanne » à travers des grillages à 200 mètres de l'ancien navire-école de la Marine nationale. Il est arrivé le 14 octobre pour des soins peu palliatifs pour une fin de vie sous forme de découpage sans pitié. Il sera suivi du « Colbert », bien connu des Bordelais. Depuis un an et l'extérieur, on a l'impression qu'il ne se passe rien ou presque. Et pourtant : depuis le mois de décembre 2014, les hommes et femmes de Veolia et ses deux filiales (Bartin Recycling et Petrofer) déshabillent l'intérieur du porte-hélicoptères.
En chiffres
11,5. En millions d’euros, le montant du contrat de démantèlement des navires « Jeanne-d’Arc » et « Colbert ».
46. En années, la durée de navigation de la « Jeanne-d’Arc », porte-hélicoptères et navire-école.
181. En mètres, la longueur de la « Jeanne-d’Arc ». Son poids : 9 000 tonnes.
150. En euros, le prix du traitement d’une tonne d’amiante par enfouissement.
1 500. En euros, le prix du traitement d’une tonne d’amiante par vitrification définitive dans une torche à plasma. Veolia a choisi l’enfouissement.
« Chaque zone connaît d'abord un curage vert », explique Hélène Maille, la directrice du projet de démantèlement. « On procède au prélèvement du mobilier et de tout équipement annexe, comme les fours des cuisines par exemple. Comme pour le désamiantage, ces opérations se font déjà en dépression, avec masque et filtre. » Dans chaque pièce traitée, l'air entré par un côté doit pousser les particules vers une autre ouverture. Une semaine de préparation est nécessaire pour chacune des 12 zones qu'a délimitées Veolia.
« De l'amiante partout »
Le désamiantage, qui survient après, est la phase la plus encadrée du process de dépollution. « Il y en a partout et la configuration d'un bateau de ce type est très complexe, souligne Hélène Maille. Tout est étroit, attaché. Et nous sommes sur l'eau. Cela rend les opérations forcément plus délicates et longues. » Un tiers du bateau a été traité aujourd'hui et 80 tonnes d'amiante et d'équipements susceptibles d'en contenir ont été sorties. Découpe de la coque et de certaines parois, pose d'ascenseurs : la logistique est d'envergure en raison de la position sur l'eau, moins confortable qu'un bâtiment classique à terre, en raison aussi de ce produit toxique qu'est l'amiante.
Sur un créneau quotidien de 6 à 13 heures, chacun des 25 opérateurs effectue un parcours draconien avant, pendant et après son intervention sur les zones amiantées. « Après avoir posé ses affaires personnelles au vestiaire sur le quai, il enfile un bleu et monte sur le bateau dans le sas personnel, explique Fabien Rivière, conducteur des travaux. Il enlève tous ses vêtements, remplacés par une tenue jetable, des sous-vêtements au tee-shirt en passant par la combinaison. Il enfile ensuite son masque, puis scotche au niveau de toutes les ruptures de textiles. »
Scaphandriers
Chaque masque est taillé sur mesure et l'opérateur sur zone est relié à l'air libre par un tuyau de raccordement, faisant de lui une sorte de scaphandrier. Des équipes de six à sept, reliés en permanence au « sasman ». Si la chaleur ne les réduit pas, les temps de travail avec masque sont de 2 h 30. À chaque pause, l'opérateur effectue la même série de « soins » toujours sous dépression d'air : une aspiration sur la tenue puis une douche de trois minutes encore habillé, déshabillage avec masque, douche et séchage intensif. À chaque fois, hormis le masque et les chaussures spéciales, la tenue est jetée. « L'ensemble du personnel reçoit une formation spécifique, où la capacité respirative est déterminante », note Hélène Maille. Respirative et pas respiratoire, car l'essentiel est là dans la façon de respirer, pas dans le volume de jeu.
Après la fin de cette dépollution, le bateau basculera dans la cale sèche voisine pour être impitoyablement découpé en ferrailles convoyées vers les aciéries du Pays basque français et espagnol. Dès que cette opération commence, le « Colbert » arrive et se met à quai pour dépollution. Prévu en novembre prochain, le retour du croiseur à Bordeaux ne devrait se faire qu'au cours du premier semestre 2016.