Mer et Marine
La fermeture en 2015 de la base navale de l’Adour a été confirmée mercredi. Une annonce qui était en vérité attendue et même devenue inévitable depuis la décision de la Direction Générale de l’Armement de se séparer des patrouilleurs de surveillance des sites Athos et Aramis. Commandées par la DGA et mis en service en 1980 et 1981, les anciennes « vedettes de l’Adour », comme on les appelait jusqu’en 1995, sont armées par des équipages de la Marine nationale. Et la base navale de l’Adour avait été justement créée en 1983 afin de soutenir ces bâtiments, assurant la surveillance et la protection des eaux situées devant le Centre d’Essais des Landes. Historiquement implantée à la station navale d’Hendaye, la marine avait alors fait ses cartons pour rejoindre Bayonne, une ville où elle disposait déjà, depuis les années 70, d'un appontement utlisé par la vedette La Semeuse, qui effectuait des missions de remorquage de cibles au profit du CEL. Située sur les bords de la rivière Adour, l’implantation où a été construite la base navale il y a 30 ans appartenait elle aussi à la DGA. Puis elle a été versée, suite à la grande restructuration entreprise en 2008 au sein du ministère de la Défense, au patrimoine de la base de défense couvrant les régions de Bayonne, Pau et Tarbes.
La DGA externalise la surveillance maritime
L’an dernier, la DGA, qui finançait aussi le maintien en condition opérationnelle des PSS, avait notifié à la Marine nationale son intension de se séparer de l’Athos et de l’Aramis, lui proposant de les récupérer. La surveillance du plan d’eau situé devant le centre de Biscarosse va, en effet, être assurée par un prestataire privé. Un appel d’offres en ce sens a été lancé et le lauréat du marché devrait être bientôt connu. On notera d’ailleurs qu’une externalisation partielle de la mission de surveillance était déjà en place, la DGA affrétant régulièrement l’Avenir et l’Embellie, deux catamarans civils de 22 mètres appartenant à Société Offshore Services. Le recours à des moyens extérieurs va donc se généraliser, avec tout de même une zone d’ombre quant à la capacité des prestataires à prévenir et gérer une intrusion dans les zones maritimes surveillées. Ces bateaux et leurs équipages n’auront, en effet, aucun pouvoir de police. Leur rôle sera donc à priori purement préventif et dissuasif.
L’abandon par la DGA de moyens navals propres et donc le départ de l’Athos et de l’Aramis, qui n’avaient dès lors plus d’utilité à Bayonne, entraine mécaniquement la fermeture de la base navale, dont le soutien des PSS était la raison d’être. La plus petite des quatre bases navales métropolitaines compte actuellement 65 civils et militaires, soit deux équipages de 14 marins pour chacun des patrouilleurs, ainsi que 26 militaires et 11 civils à terre. La fermeture de l’implantation interviendra sans doute au second semestre 2015. Il faudra en effet attendre le départ des PSS, qui pourraient rejoindre la Gendarmerie maritime, pour entreprendre le transfert du matériel vers d’autres bases navales, à commencer par celle de Brest.
Transférer la charge de vice-roi de l’île des Faisans
La fermeture du site, dont l’avenir n’est pas encore fixé, va s’accompagner de la suppression du commandement de la marine à Bayonne. Une décision qui pose un problème diplomatique, le COMAR étant également « vice-roi de l’île des faisans », un bout de terre franco-espagnol situé au milieu de la Bidassoa, à Hendaye, et que les deux pays administrent à tour de rôle tous les six mois. C’est le commandant de la marine à Bayonne et son homologue espagnol de San Sebastian qui assument cette responsabilité. Historiquement, la gestion binationale de ce territoire, qui constitue le plus petit condominium du monde, remonte à la fin du XIXème siècle. Pour éviter que l'île devienne une zone de non-droit et mettre fin aux différends entre pêcheurs français et espagnols des deux rives de la Bidassoa, Paris et Madrid avaient décidé de confier la gestion de cet espace alternativement aux commandants des stations navales riveraines. Quant à savoir pourquoi l’île était jusque là « apatride », il faut en fait remonter au traité de paix franco-espagnol des Pyrénées, signé ici même le 7 novembre 1659. S’il peut paraître pour le moins anecdotique, voire folklorique par son nom aujourd’hui désuet, le titre de « vice-roi de l’île des faisans » implique des responsabilités plus importantes qu’il n’y parait. Il s’agit en effet d’une véritable charge diplomatique, mais aussi de gestion de territoire. L’officier a en effet la responsabilité des activités nautiques et de la pêche dans la Bidassoa, mais aussi dans la baie de Txingudi, là où le fleuve se jette. Et dans cette zone, il faut administrer plus de 500 mouillages de navires chaque année. Après la fermeture de la base navale, une petite cellule d’une demi-douzaine de personnes devrait demeurer à Bayonne pour gérer les aspects administratifs de la fonction de vice-roi de l’île des faisans. Quant au titre, il devrait être transféré au commandant de la marine à Bordeaux.
La zone toujours surveillée par d’autres administrations
Enfin, on notera que la fermeture de la base navale ne posera pas de problème quant aux missions liées à l’action de l’Etat en mer dans la zone, notamment en ce qui concerne le contrôle des pêches. L’Athos et l’Aramis n’étaient en effet qu’exceptionnellement employés au profit de l’AEM et, la plupart du temps, il s’agissait en fait d’une participation d’opportunité résultant de la présence, à un moment donné, de l’un des deux patrouilleurs. Les missions continueront d’être assurées par la Gendarmerie maritime, les Affaires maritimes et la Douane, qui disposent chacune d’une vedette à Bayonne, dont la mise en œuvre et le soutien ne dépendent pas de la base navale.
J-M