Génial.

Je ne me souviens plus de la date ni du jour mais le Pachyderme avait appareillé très tôt le matin de Toulon avec en remorque un But de tir type AD (ceux qui ont des grands panneaux) tout en cornières avec deux grands flotteurs cylindriques.
C'était un engin que l'on remorquait avec un câble de deux milles mètres de long (l'on se mettait à l'abri des obus perdus) et de diamètre 12,5 si j'ai bonne mémoire.
Ces fiers vaisseaux de l'escadre se sont amusés à le flinguer sans le couler de 8h à 15 ou 16h.
Là, nous avons eu liberté de manœuvre, ils se sont empressé de rentrer full speed et nous avec notre engin derrière, toujours à quatre nœuds, route pêche vers la maison.
Ce jour là le second Bosco était absent je ne sais plus pourquoi, c'était donc moi le plus vieux des crabes chefs bosco qui dirigeait les diverses manœuvres dont principalement la remorque.
Le mistral se levait et nous étions à peu près vent debout.
Il me semblait que l'on avait accéléré l'allure, je suis donc monté à la passerelle en demandant au Pacha pourquoi l'on accélérait, il me répond :
- "Car nous sommes en retard, ce soir j'ai des invités à la maison".
Moi je voyais l’état de la mer qui grossissait et la remorque pourtant longue de deux km qui commençait à vouloir "fouetter" terme que les boscos connaissent et qui dit que si la remorque fouette hors de l'eau, elle est sur le point de casser.
Ce qui devait arriver arriva, et nous voici avec un but qui a une prise au vent terrible largué au gré des flots.
Le Vieux entre dans une colère terrible et me convoque à la passerelle en me disant de faire vite pour récupérer la remorque en pendant dans l'eau (environ 1800 m) et de prévoir une équipe de quatre hommes pour descendre sur le but que nous allons accoster.
Pendant ce temps là, l'on dérivait à la vitesse de plus en plus grand V et la houle se formait de plus en plus.
Nous avions réussi mes six hommes et moi (j'avais pris deux de plus tous marins pêcheurs qui faisaient leur sapin donc des gars qui n'avaient pas peur et pourtant, à cette époque, pas de brassières) nous avons remonté la patte d'oie à l'avant mais impossible de remonter ce câble de deux cents et quelques mètres qui pendouillait, nous avons réussi à le démailler et à le larguer au fond de l'eau.
Le bord nous a passé une nouvelle remorque que nous avons fixé sur la patte d'oie.
A partir de ce moment, il fallait remonter à bord, et là pas de coupée ni rien, le roulis était tel que l'on voyait un coup le pont, un coup la quille de roulis.
C'est donc, et je n'exagère pas, au péril de notre vie qu'après maintes acrobaties j'ai rejoins mes gars sur le pont.
La nuit était tombée, remorque courte (environ deux cents m), nous voilà repartis sur Toulon.
Et revoilà mon Pacha là haut qui accélère, je n'ai pas eu le temps de monter que de nouveau la remorque se rompt.
Alors là, nous étions dans la baie de Carqueiranne et le but avec le mistral est parti s'échouer sur la plage et nous avons passé le reste de la nuit là, à tourner en rond avec une équipe de terre venue de la DP.
Je pense que les invités attendent toujours.
Arrivés à Toulon, le Pacha a été convoqué chez le Major Général qui suite à son rapport nous a, mes six gars et moi convoqués.
Conclusion : le Pacha a débarqué et nous avons récolté d'abord des félicitations pour notre courage et ensuite une engueulade pour avoir obéi à cet ordre.
Comme quoi...
Kenavo et à + peut-être.