50 années viennent de s ‘écouler !!…
Il y a donc 50 ans, jour pour jour, nous étions environ 150 ados, âgés de 15 à 16 ans, qui convergions vers Loctudy en provenance de toutes les régions de France. Chaque train qui arrivait débarquait son lot en gare de Quimper. Aussitôt pris en charge par les gradés, sur le quai, nous embarquions dans les camions qui devaient nous amener vers notre nouveau destin.
L’estomac noué je découvrais la Bretagne. Les yeux écarquillés je voyais pour la première fois des bigoudènes avec leur étonnante coiffe qui les obligeait à tenir la tête penchée sur le côté dans les 4 CV si nombreuses à cette époque. Les maisons aux façades uniformément blanches avec des toits en ardoise noire ne manquaient pas de me surprendre également.
Après avoir quitté Quimper, traversé Pont L’Abbé et roulé dans la campagne le château du Dourdy nous attendait. Rassemblés sur le « plateau » face à cette imposante bâtisse les gradés faisaient l’appel puis nous conduisaient vers les baraquements qui nous étaient dévolus. Eh oui, le château n’était pas pour nous : les pupilles, la 1ère compagnie et les maistranciers en étaient les locataires !
A l’issue des traditionnelles formalités d’embarquement une dizaine de départs eurent lieu, inaptitude médicale ou résiliation de contrat en raison d’un traumatisme trop important en découvrant la réalité ce qui nous attendait. Pour ceux qui quittaient, pour la première fois, le milieu familial il y avait de quoi être ébranlé : promiscuité des chambrées, réveil au clairon, cross matinal dans la lande, déplacements en rang et au pas…..
Pour les rescapés une année exceptionnelle, qui devait nous marquer pour toujours, débutait. Les gradés qui nous encadraient, dont nombre d’entre eux étaient bien marqués par les embruns et autres produits corrosifs, avaient pour mission de transformer une bande d’ados en marins. Ils allaient s’y employer à leur manière avec une pédagogie plutôt rustique mais efficace. Qui a oublié le Mt Zimmerman, énonçant avec son accent si particulier, lors des inspections de chambrées « Il y de la m…e dans les caissons, il y a de la m…e sur les caissons, il y a de la m…e sous les caissons ! » prélude, au mieux, à nouvelle inspection sinon à un tour de consigne ou une séance de peloton ?….
Ces séances de peloton distribuées avec générosité eurent pour résultat d’endurcir les corps et renforcer notre mental. En effet, rien de tel que les « marches en canard » pour muscler cuisses et mollets. Que dire des séances collectives, mousqueton sur l’épaule, casque lourd (sans sous-casque) en tournant au pas de gymnastique entre le lavoir et le garage ? Il n’était pas question alors de faiblir ou pleurer de douleur en présence des copains et de ces p..ains de gradés !
De telles méthodes qui auraient pu amener leurs auteurs devant les tribunaux, aujourd’hui, me paraissent, avec le recul, acceptables. Ces petites souffrances physiques et morales nous ont endurcis pour affronter les difficultés de l’existence, encaisser les injustices, ne pas baisser les yeux en présence d’un chef ou d’un patron imbuvable.
Peut-être qu’après 50 années les souvenirs se bonifient et les épisodes les plus déplaisants s’estompent. L’énumération de ce que nous avons vécu dans cette École serait fastidieuse et inutile, tout a déjà été dit par d’autres anciens.
Je ne peux que terminer maintenant. MERCI à cette École pour ce qu’elle a apporté à l’ado que j’étais alors, et qui cherchait un sens à sa vie. Je n’ai pas oublié, non plus, les valeurs qu’elle m’a inculquées.