par DUJARDIN 76 Sam 29 Mai 2010 - 14:18
Durant 3 jours, une courte immobilisation m'a empêché de venir sur ce forum qui, depuis la remontée de la Seine par la Jeanne, s'est largement garni de témoignages et de photos provenant même de marins n'ayant jamais navigué sur la vieille dame. C'est le côté magique de notre PH. J'adresse toutes mes félicitations aux photographes qui ont admirablement illustré cette dernière escale à Rouen.
Pour ma part, dès le vendredi 21 je me trouvais au Havre afin de suivre la remontée de la Seine. Par chance, vers 13h00, la brume s'est dissipée avant que la Jeanne passe sous le pont de Normandie. La remontée fut suivie par des centaines de personnes, appareils photos et caméras en main; il fallait immortaliser à jamais ce moment. Le soir vers 20h00 notre fier vaisseau entrait dans le port de Rouen, accueilli par une foule compacte et un bateau pompe.
Le samedi vers 11h00 j'allai à la brasserie "la Walsheim" pour retrouver quelques anciens bien connus du forum comme: JeanClaude77, 91Jarcy, Tragin, pylone76, Guefjo, Henri Sar et Daniel Medaerts qui n'a jamais embarqué sur la Jeanne. L'apéro fut offert par le patron et le déjeuner fut à la hauteur de la joie qui enveloppait nos coeurs. Dans la soirée, lors du bruyant cocktail du bord, j'en retrouvais quelques-uns et je faisais la connaissance de l'incontournable Jojo Chandelier. Cet homme connu de tous a dans les yeux une humanité hors du commun. Il laisse dans son sillage la trace de sa bonhomie. Pour le repas du soir c'est sans hésitation que nous sommes allés faire la deuxième mi-temps dans "notre" brasserie avec quelques copains volontaires et notre Jojo que je raccompagnai à son hôtel vers ...1h00 du matin, après avoir bu la coupe de champagne de l'amitié offerte par le patron de la Walsheim (un grand merci pour l'accueil qui nous fut réservé, tant par le personnel que par le patron).
Le lundi, je me trouvais sur le quai avec certains membres de l'association des anciens de la Jeanne. c'est Francis qui nous servit de guide.
Le lendemain, ce fut le grand jour puisque dès 9h30, avec mon ami Henri Sar, j'empruntai la coupée pour une descente de la Seine jusqu'à Honfleur. L'accueil par tous les membres de l'équipage fut exemplaire. Le départ de Rouen fut émouvant avec quelques larmes déposées sur les quais et les musiciens du bord interprétant "Ce n'est qu'un au revoir". Dès que le navire fut en ligne, les odeurs, les vibrations, le bruit des machines, les communications sonores, m'ont fait rajeunir de 45 années. Que dire du plaisir d'avoir déjeuner à la cafétaria équipage, de m'être assis dans le PZ milieu où j'ai passé tant d'heures de quart, d'avoir pu discuter avec le chef mécanicien Maille qui préparait avec émotion sa tentative de battre un dernier record de vitesse dans la nuit. Il y croyait dur et savait que les moteurs de la Jeanne avaient encore de belles possibilités. Le défi a été gagné dans la nuit, avec une vitesse de 30,9 au GPS et 29,4 au LOCH.
La descente vers Honfleur s'est faite doucement, toujours suivie par une foule émue. Un bel orage entre le pont de Brotonne et celui Tancarville est venu laver le pont d'envol, ce qui nous a obligés à venir nous asseoir sur les bancs des coursives extérieures. Cela nous a permis de discuter avec les marins qui s'y trouvaient. Il y avait sur ces bancs toute la vie de la Jeanne: les anciens de la première campagne et ceux de la dernière. Aucun de ces "jeunes" n'étaient nés (même le commandant Patrick Augier), quand nous étions à bord. Nos cheveux blancs (pour ceux qui en ont encore) étaient le témoignage du temps passé.
Après le passage sous le majestueux pont de Normandie dans une légère brume, nous arrivions à Honfleur où une haie d'honneur de Midships attendait, avec tapis rouge, les anciens commandants de la Jeanne embarqués pour l'occasion.
Je débarquai vers 20h30, après que le commandant eut serré la main de tous ses "passagers d'un jour".
J'avais la tête pleine de souvenirs mais aussi beaucoup de peine de savoir que je ne "LA" reverrai plus jamais.
Adieu la Jeanne, toi qui m'as permis de passer de l'adolescence à l'âge adulte.
Que les Brestois, par leur visite, te rendent le plus grand des hommages.
Jean-Jacques