Cinq York furent utilisés par l’Aéronautique navale à partir de fin 1954, dont quatre à l’escadrille 31S de Dugny le Bourget : MW137(PA.1) MW243 (PA.2), MW265 (PA.3) MW169 (PA.4) et MW234.
Codés PA pour Paris.
Ces York venaient renforcer les SO 30P Bretagne mis en service pour succéder aux Languedoc.
Dérivé du Lancaster pour quelques gros éléments dont les plans, les quatre moteurs Rolls-Royce Merlin XX et le train, son grand fuselage rectangulaire offrait une capacité d’emport importante et une assez bonne facilité de chargement grâce à son large plancher plat.
Malgré leur état de vieillissement ces appareils se révélèrent parfaitement adaptés au transport de charges lourdes et encombrantes comme les moteurs, en particulier à destination des bases d’AFN et d’AOF, les stocks de pièces de rechanges du Lancaster facilitait leur maintenance.
En 1955 trois York furent regroupés au sein d'une section de la 31.S, baptisée Section York et placée sous les ordres de l’OE Ducos, elle fut rendue autonome le 1er mars 1956 et la même année les York participa au transport lors des opérations de Suez.
La Section fut dissoute le 1er novembre 1961 et les avions condamnés.
De 1955 à 1959 j’ai eu plusieurs fois l’occasion de voler sur York, le plus souvent avec l’OE Ducos, un moustachu du pilotage des gros porteurs, à bord, comme tous les volants des unités dépendant du Sc/Aéro en région parisienne, SAMAN, STTA, SMPA, etc... j’avais la fonction de convoyeur.
Le programme de vols des liaisons aériennes de la Marine, le SLAM (STAM pour le transport) était géré par une petite équipe basée au SAMAN, dont le chef était à mon époque le MP mécanicien volant Pierre Lagadec, une figure.
Le ravitaillement des BAN était planifié par le SAMAN selon les besoins des formations et les types d’appareils, la Section STAM organisait alors l’acheminement des matériels en coordination avec la 31S pour le choix des avions, SO 30P ou York, en fonction de la destination et du volume .
A partir de Paris les escales vers la Tunisie étaient, d’abord Marseille Marignane, où étaient acheminés les matériels en provenance de l’entrepôt de Cuers, puis Lartigue, Alger et Karouba, et vers le Maroc, même trajet jusqu'à Lartigue, puis Casablanca et Agadir, avec prolongement possible sur Dakar Yoff, quand il y avait du fret pour la 27F ou les avions de Ouakam.
Le York était très bruyant, davantage que le Lancaster, et c’est peu dire, le grand fuselage était une vraie caisse de résonance, les quatre Merlin y étaient pour quelque chose, mais il faut dire que comparativement au Languedoc, il était plutôt fiable et sans ennuis mécaniques ou hydrauliques majeurs, les moteurs étaient des horloges…
Indépendamment de la paperasse, manifestes, états de chargement, documents douaniers, etc... nous assurions le chargement de l’appareil et la répartition des poids pour respecter le centrage, aidés en cela par les équipes locales, depuis le vulgaire colis jusqu’aux éléments de voilure et aux moteurs en caisse, tout était consciencieusement arrimé, sous l’œil vigilant du patron d’appareil.
Drôle de boulot pour un volant, mais il fallait bien faire les 40 heures dans l’année…
Nos rapports avec les équipages étaient excellents, on partageait les mêmes péripéties, qui vu l’âge des avions, ne manquaient quand même pas, pour les sédentaires que nous étions ces vols nous remettaient dans l’ambiance du métier, le mécano ou le radio nous cédaient quelquefois leur siège en cours de vol et les escales nous permettaient de revoir les copains.
J’ai fait mon dernier vol sur York en tant que passager lors de ma désignation pour Dakar en 1959.
Je ne doute pas que parmi les anciens quelques uns se rappelleront d’avoir vu cette grosse bête et peut-être même d’avoir travaillé dessus.