Au passage, nous remarquons que le chalutier Coréen "HANDGIN N° 6" n'est pas autorisé sur nos listes pour la période considérée.
Vers 13h30, après avoir vérifié les licences de l'ensemble de la flottille nous lui faisons remonter ses chaluts.
- Spoiler:
- L'annexe pneumatique étant inutilisable, nous approchons le chalutier sur son arrière et lui demandons de présenter sa licence.
Après quelques minutes, le capitaine nous fait savoir qu'il ne la trouve pas.
Nous lui demandons alors de nous suivre jusqu'au mouillage des Îles du Salut.
A 18h30 l'Handgin N°6 mouille sur nos instructions sous le vent de l'île Royale.
Immédiatement, nous nous mettons à couple et procédons au démontage des rampes d'injection du moteur principal.
A 19h00 le P.780 prend le coffre de l'île Royale, soit à environ 150 mètres du mouillage du crevettier.
A 23h20 le chalutier est toujours mouillé.
A 00h20 l'homme de quart constate la disparition du chalutier.
A 00h30 nous larguons le coffre et appareillons tous feux "masqués".
Comble de malchance le radar ne fonctionne plus, la nuit est particulièrement noire.
En fait, le chalutier avait des rampes d'injection en "secours", il a donc tranché sa ligne de mouillage (1) et s'est laissé porter par le courant général permanent (1.5/2 nœuds).
Quelle est sa direction de fuite ?
Fait-il route directement vers la frontière en coupant au plus court par la ligne de sonde des 10 mètres.
Ou est-ce un "stratège" qui tire au large (N-NE) pour être hors de portée radar ?
Dans le doute et ayant l'avantage de la vitesse 24/25 nœuds contre 7/8 nœuds nous tirons au large.
Vers 01h00 du matin nous détectons une flottille en pêche dans le nord des îles pour 12 nautiques.
Au projecteur, nous les identifions un à un sans retrouver notre fugitif.
Avec l'électricien du bord nous démontons la carrosserie du "scoop" radar en espérant qu'il ne s'agit pas d'un problème d'aérien ou de guide d'onde.
Nous avons à bord un lot de cartes électroniques de rechange et nous remplaçons élément par élément.
Enfin vers 01h20 le scoop fonctionne à nouveau sur 3 milles mais c'est déjà mieux, nous ferons avec.
Nous contrôlons un chalutier isolé qui s'avère Japonais.
Vers 01h30 nous avons un écho distant de 2 nautiques, qui navigue tous feux éteints !
A 01h40 nous l'identifions comme étant l' "Handgin N° 6".
Sa position est la suivante 320 de l'île Royale pour 15 nautiques.
Nous tentons de le faire stopper en faisant des signaux optiques et acoustiques qui restent sans effet.
Il essaie lors de notre approche de nous éperonner (Il fait 24 mètres et c'est une coque acier...!!!)
Vers deux heures je procède à un tir de semonce au pistolet (10 cartouches) sans résultat.
Cerise sur le gâteau, les armes individuelles détenues à bord étaient en cours d'approvisionnement par la Gendarmerie Maritime, la première partie venait d'être livrée sans "ressorts" les PM ne pouvaient donc tirer et les PA seulement en introduisant manuellement les cartouches directement dans la chambre (c'est à dire une par une)...!
Je décide d'attendre le jour pour mieux apprécier la situation, nous avons encore de la distance avant la frontière du Surinam...!
Nous nous plaçons dans ses eaux à 1/4 de nautique.
Heureusement, il nous reste la "12,7" et 200 cartouches en bande panachée (Lot qui faisait partie du bord).
Je connais cette arme pour l'avoir étudiée en gendarmerie mobile lors d'un brevet d'arme N°1 (porté).
A 06h00, la mitrailleuse est mise en place sur son affût plage avant.
J'effectue quelques tirs de semonce qui restent sans effet.
En fait la situation est la suivante ; quand je m'approche pour tirer, le commandant du chalutier (qui est sous pilote automatique) quitte la passerelle et se met à l'abri.
Quand je m'éloigne de la 12,7, il réapparaît.
Nous tentons de l'approcher pendant ce moment d'absence, mais il nous guette et tente de nous aborder...!
Vers 09h00, 150 cartouches ont été utilisées sans résultat.
Le tir se fait plus "encadrant" (La 12,7 à 80 mètres c'est précis...).
Je tire à nouveau 3 munitions traversent le pavois, 3 autres le local barre.
Nous cessons le feu et attendons, le commandant réapparaît.
Il refuse de stopper, j'explose le radar et transperce la passerelle....!
Nous lui montrons une caissette métallique de munitions (en fait elle était vide!) et par geste je lui fais comprendre que je vais tirer dans la passerelle.
Il lève les bras et stoppe son bateau, enfin...!
Il est 09h30 !!! Nous sommes approximativement à 80 nautiques des Iles du salut !!
Immédiatement nous abordons le chalutier par l'arrière, et embarquons le capitaine à notre bord.
Ces équipages Coréens étaient souvent constitués de repris de justice qui effectuaient leur peine de cette manière.
En montant à notre bord il se couchera sur la plage avant à plat ventre devant moi, s'attendant sans doute à recevoir la raclée de sa vie !
Personnellement je voulais l'arraisonner et le but était enfin atteint !!!
Nous faisons route vers les îles du Salut que nous doublons le 26 à 01h30 du matin le courant est contre nous (le crevettier fait péniblement 6 nœuds).
Vers 06 heures à la bouée d'atterrissage de Cayenne l'équipage de prise embarque et conduit le chalutier à l'appontement du Larivot.
Le P.780 rallie Dégrad des Cannes où nous arrivons à 08h20 !
(1), Suite à cet incident nous avons changé de méthode en ce qui concernait l'immobilisation des chalutiers.
Le plongeur/bosco/secrétaire, du bord entravait hélice et safran au moyen d'une robuste chaîne et de manilles.
A terre :
Pendant cette poursuite, dès 08h00 c'était aussi le "branle bas", je rendais compte au COMAR à Fort-de-France de l'évolution de la situation, et le Commandant militaire de la Guyane (un ancien "Marsouin" d'Indo et d'Algérie) me proposait l'intervention d'un hélico, soit pour de l'armement/munitions soit pour un hélitreuillage d'un "commando".
Finalement tout est bien qui finit bien...!
Pencoat63