Les vestiges de l'ancien sémaphore de Kerhoazoc à Landunvez, situées sur le point culminant de la côte sont visibles de la route touristique (D127) qui relie l'anse de Penfoul à Kersaint.
- Spoiler:
- En 1860, l'Amirauté, de,Brest décide que chaque sémaphore serait établi selon un plan en T pour abriter à la fois le personnel (en fait les 2 guetteurs et leurs familles et le matériel de fonction) Celui de Kerhoazoc fut édifié,en 1865. En 1870, étaient en fonction dans le pays d'Iroise les sémaphores du Stiff et de Créach à Ouessant, pointe de St-Mathieu, Le Conquet, Corsen et, le plus au nord Kerhoazoc. Le sémaphore de Molène entrera en service en 1877.
La photo prise de satellite fait apparaître les ruines encore existantes. On remarque les fondations en forme de T avec, en bas de l'image, les 2 logements des guetteurs, en haut, les locaux destinés à la veille, notamment la chambre de veille avec une partie en demi-cercle et au centre les autres locaux (entrepôts de matériel, casernement, etc...).
Les guetteurs sémaphoriques de ma génération ne manqueront pas de remarquer qu'en matière de logements et d'effectifs de guetteurs en fonction, les choses n'ont que très peu évolué pendant un siècle plus tard. Les diverses catastrophes maritimes et, en particulier, celle de l' Amoco Cadiz ont radicalement modifié le rôle des sémaphores et leur ont attribué matériels et personnels conséquents.
La carte postale que M. Patrick LOUKIANOFF m'a autorisé à publier sur ACB date des années 1930. On voit un mât Dupillon surmontant le bâtiment, une antenne radio est installée à gauche sur la terrasse au-dessus du mât à pavillons. On aperçoit tout à gauche le canon porte-amarre destiné à prévenir les navires qu'un message Dupillon va leur être adressé. La stricte fonction de lance-amarre me semble peu probable en raison de la distance séparant le sémaphore au rivage. On retrouve d'ailleurs des canons identiques dans d'autres sémaphores de Bretagne et leur fonction devait probablement se limiter à avertir les navires qu'ils couraient sur un danger.
Pour se prémunir de la menace des sous-marins allemands pendant la guerre 1914-1918, une chambre d'écoute par hydrophone immergé fut installé au Stiff, au sud, relié à celui de Kerhoazoc, au nord, qui bénéficiait lui aussi du même équipement. C'était d'ailleurs les deux seuls sémaphores du Fromveur à être dotés de cette installation.
La consultation d'archives m'a permis de ressortir divers évènements qui ont jalonné l'existence du sémaphore.
Ainsi, en septembre 1911, le guetteur du sémaphore signale le naufrage du vapeur belge Flandre à trois milles au large. Un autre vapeur qui se trouvait à proximité et le canot de sauvetage d'Argenton sont parvenus à sauver l'équipage.
Le 24 février 1918, un hydravion en panne de moteur amerrit face au sémaphore. Les 2 occupants parvinrent à regagner la côte mais le canot de sauvetage Henri Munier tenta en vain de prendre en remorque l'aéronef.
Le naufrage du vapeur norvégien GYLLER de 52 mètres est ainsi relaté par le Courrier du Finistère du 14 septembre 1918 "dans la nuit du 9 au 10 septembre, un navire norvégien trompé par l'obscurité et drossé par les vents d'ouest est venu se jeter sur les rochers de la pointe de Kerhoazoc, en Landunvez. L'équipage composé de 14 hommes a péri, sauf 2 matelots, qui ont été sauvés grâce au courage du quartier-maître LE GOASTER du poste sémaphorique de Kerhoazoc. Le navire portait un chargement de charbon.
Le lendemain la mer rejetait sur la grève de Feunteun-aod le cadavre du second du navire Un autre cadavre a été recueilli in mer, près de Portsall et autres à Saint-Pabu Seuls deux membres d'équipage sont arrivés à la côte sur la plage de Penfoul, en assez piteux état, mais vivants"
Au cours des années 1980, l'épave du Gyller fut découverte lors d'un partie de pêche sous-marine et identifiée. Le 9 septembre 2018, soit exactement 100 ans après la tragédie,des descendants des deux rescapés ont été dignement accueillis par l'quipage du canot SNSM d'Argenton-Landunvez et certains d'entre eux ont plongé sur l'épave.
Le 2 septembre 1939, alertés par le chef guetteur du naufrage d'un bateau goémonier revenant des îles avec deux hommes et un cheval à bord, les canots de sauvetage d'Argenton et de Portsall sortirent en vain à leur recherche , mais ne parvinrent pas à retrouver les victimes. Seul le cheval réussit à atteindre à la nage le rivage à proximité du sémaphore. On se perd en conjectures sur les circonstances de ce naufrage : la panique de l'animal, qui parvint à briser la chaîne qui le reliait au mât et à crever la coque est l'hypothèse la plus communément admise.
Lors de la mobilisation générale de 1939, 20 réservistes vinrent suppléer les 2 guetteurs avec les difficultés d'hébergement engendrées par ce renfort de personnels.
Avant l'arrivée des allemands, le matériel sensible fut soustrait, disséminé et caché par les autochtones. Le 19 juin 1940, le canot de sauvetage de Portsall (le Charles et Marie Chevillotte) emporta 31 personnes (dont 13 portsallais et 9 marins au service du sémaphore de Kerhoazoc) jusqu'à Plymouth pour
échapper à l'envahisseur.
La plupart d'entre eux s'engagèrent dans les FNFL et en particulier Yvon SALAUN (19 ans) qui participera plus tard au débarquement des Alliés sur les côtes normandes. Il disparaîtra en mer le 24 février 1945 sur la Combattante qui sauta sur une mine en mer du Nord. Le canot SNSM de portsall portera son nom et restera en service de 1955 à 1988.
La fin du sémaporte fut ainsi rapporté par le site "Patrimoine d'Iroise" "En août 1944, les allemands quittèrent le sémaphore afin de fuir les Osstruppen (soldats russes enrôlés de force dans l'armée allemande) qui s'étaient révoltés. Mais ils prirent soint de faire sauter toutes les installations."
Depuis le sémaphore de Kerhoazoc n'a pas été reconstruit.
Malgré les ,ruines constatées actuellement, le sémaphore de Kerhoazoc n'est pas encore tombé en totale déshérence. M. Jean-Pierre PROVOST, guetteur sémaphorique en retraite; s'efforce de ne pas faire tomber dans l'oubli ce qui reste,de l'ouvrage. La commune de Landunvez et la communauté de communes ont prévu de prendre en charge la sécurisation des murs, la signalétique et la mise en valeur du site. Jacky (suroit17) et moi-même avons suivi notre formation initiale de guetteur avec-Jean-Pierre.
Quoi qu'il en soit, devant les vestiges du sémaphore, pour le régal des yeux; s'offre un magnifique panorama et c'est un ravissement de contempler ces chevaux de race postier breton, heureux d'être là au bord de la mer par tous les temps, rustiques et très peu farouches comme l'attestent ces photos prises il y a une quarantaines d'années et extraites de mes archives personnelles.. Ces chevaux bénéficient du droit de libre pâture. Que cette liiberté leur soit perpétuée !
Tous mes remerciements à M Patrick LOUKIANOFF et à son remarquable site "PATRIMOINE D'IROISE".