par HèmBé43 Mar 18 Fév 2014 - 13:26
Souvenir d'Hourtin ou comment j'ai vu mon passage dans la marine sombrer vers le néant.
Lors d'un tour de garde à l'aubette je fus affecté après avoir été réveillé les boulangers à 4 h du matin à la manœuvre de la barrière style" passage à niveau" qu'il y avait à l'entrée principale. Il y avait dans la guérite du factionnaire un tableau décrivant précisément les procédures d'accueil mais j'avais observé qu'elles ne semblaient pas trop respectées par mes prédécesseurs à ce poste. Donc sur le coup de 7h30 / 8 h quand tout le monde arrivait sur la base je manœuvrais allègrement ma barrière pour laisser entrer les véhicules. Quant aux piétons certains me gratifiaient d'un vague bonjour, d'autre exhibaient un laisser passer que je n'avais pas le temps de voir ou d'autre passaient en m'ignorant totalement. Je ne disais rien pensant qu'ils avaient l'habitude... et ne sachant pas trop à qui j'avais affaire, je choisi de ne pas faire trop de zèle.
Donc depuis mon poste de manœuvre de la barrière je voyais en enfilade la route rectiligne venant d' Hourtin et une 4CV conduite par un second maitre arrivant plein pot mettant son clignotant pour tourner à gauche, afin d'entrer sur la base. A la vitesse où il allait j'ai pensé qu'il était en retard car il était 8 h passé. Du coup pour ne pas le retarder un peu plus je relève prestement la barrière.
Et c'est là que tout bascula, en effet arrivait par l'autre coté la voiture du commandant venant de sa résidence en dehors de la base et je ne l'avais pas vu car caché par la guérite. Donc mon second maitre et sa 4 cv s'engouffre dans la base sans ralentir (il avait un panneau de limitation à 20 km/h) en refusant la priorité à la voiture du commandant et poursuivant son chemin sans s'arrêter vers son service... Faute de respect des grades et infraction au code de la route car refus de priorité à droite et le tout au volant d'une voiture civile...[page]
A la suite de ça ne m'étant rendu compte de rien et n'étant pas conscient du crime de lèse-majesté qui venait de se produire, j'attendais ma relève, 8h étant largement dépassé.
Lorsque je suis interpellé par un :" Factionnaire !!!" tonitruant et peu amène. C'était le commandant en personne qui avait qui avait fait stopper sa voiture devant le poste et m'appelait... je me précipite ...
Il me demande qui était dans la 4 cv ... ignorant la réponse je traverse un grand moment de solitude...
et ne trouve à bredouiller, pour ma défense, lorsqu'il me demande si mon rôle est de laisser entrer n'importe qui sur la base, qu'étant en uniforme ce second maitre avait probablement l'autorisation... ce qui n'a pas vraiment arrangé les choses...
N'ayant pas la même appréciation logique que moi, s'en suit un savon et une engueulade de première, pensez donc je laissais le passage libre à n'importe qui... et sans l'identifier ce qui était le rôle du chef de poste que je devais normalement prévenir à chaque nouvel arrivant et pas le mien.[page]
A ce moment je vis les perspectives de ma carrière maritime basculer : sans nul doute possible j'allais être puni... et faire de la prison... ou pour le moins être affecté je ne sais où à exécuter les pires corvées pour racheter mes gaffes... (On nous avait dit que les affectations étaient attribuées en fonction de son comportement et des résultats obtenus au cours du séjour au CFM). Bref après une telle bévue c'était mal parti et j'étais dans mes petits souliers...
A la Faveur d'une accalmie et pendant que le commandant s'occupait du quartier maitre chef de quart le second maitre qui assurait la relève me renvoya dans ma compagnie ce que je fis, vous pensez bien, sans demander mon reste...
De retour dans ma section mon second maitre me dit en voyant ma mine défaite qu'il fallait attendre que ça se tasse et que ce n'était peut être pas si grave. Je n'en étais pas profondément convaincu car à partir du lendemain les consignes étaient scrupuleusement respectées et il y avait la queue devant l'aubette... Il n'y avait pas que moi qui avait du prendre une ronflée...
Effectivement je n'en ai jamais plus entendu parler mais j'ai revu une seconde fois le commandant, alors que j'étais planton au bâtiment de commandement on m'a chargé d'aller lui porter un dossier,
au moment de rentrer et après avoir cogner à la porte de son bureau je me suis senti fondre, je ne savais plus quand il fallait saluer, s'il fallait se découvrir, bref, j'avais le trouillomêtre à zéro, et après avoir traversé un bureau qui m'a semblé immense je n'ai trouvé qu'a dire, bêtement après avoir salué, "bonjour commandant on m'a chargé de vous remettre ce dossier".
M'a t'il reconnu ? Je ne sais, mais j'ai trouvé qu'il me regardait avec un drôle d'air et je suis ressorti, après un demi-tour réglementaire, en oubliant de saluer à nouveau mais avec la sensation d'avoir creusé un peu plus le trou ou je glissais inexorablement...
Et c'est comme ça que trois semaines plus tard après l'examen de fin de classes et le passage devant l'adjudant de compagnie j'arrivais un beau matin de Décembre à Toulon pour embarquer sur le COOLIE et là c'est une autre histoire. [page]