Il y avait encore à cette époque des jeunes qui partaient à l'autre bout du monde en quête d'absolu, j'en ai rencontré. Cheveux longs, des fleurs, hirsutes ils allaient à Katmandou.
J'avais 18 ans, j'étais à la Réunion et j'avais besoin de changer d'air. Ma première intention était l'île Rouge, Madagascar. Mais, son accès était, à cet époque, interdit. Ayant un maigre pécule, je me suis rabattu sur l'île Maurice.
A peine débarqué à Plaisance, une adresse dans la poche, à Rose Hill, j'étais totalement dépaysé. Le premier objectif était d'ores et déja atteint. De bus brinquebalants en bus pétaradants, je suis arrivé à bon port devant le domicile d'amis d'un collègue. Je devais juste leur déposer un cadeau. Ils m'ont gardé huit jours !
Heureusement pour moi qui était quelque peu désargenté. (à vrai dire, je comptais faire du "beach-combing"). Lors de mon séjour, une visite officielle était prévue, et pas n'importe laquelle, pas moins que le 1er ministre Indien de l'époque, à savoir, Indira Gandhi ! Ce n'est donc pas une cérémonie qui m'a impressionné, c'est tout un ensemble, et les préparatifs, la ferveur des Mauriciens, majoritairement d'origine Indienne.
Comme mes maigres moyens ne permettaient pas grand chose, je marchais beaucoup.
Jeans à pattes d'eph, tee shirt, raybans, toute une époque et sac en bandoulière, je parcourais les campagnes au milieu des champs de cannes à sucre.
Je me souviens d'un soir, le jour déclinait, j'arrivais dans un village noyé au milieu de ces champs. Un immense arc de triomphe végétal formait l'entrée. Peu de monde, quelques hommes assis sur le pas de leur porte, des femmes en sari, l'oeil de civa sur le front, tous la face sombre, un ciel nuageux, le calme, seul s'élevait la mélopée de tambours.
J'étais seul, dans un pays inconnu, dans une ambiance sourde d'attente.
Des frissons m'ont parcouru malgré la chaleur moite de cette fin de journée, et je pensais, à ces jeunes européens qui partaient vers le nirvana, j'étais jeune, un marin loin de chez lui, j'étais seul, avec la chanson de Delpech en tête, white is white...
Oui, un simple bled, en pleine cambrousse Mauricienne, impressionnant , c'était en 1976.
Bien amicalement TUR2