Les caractères latins ont été introduits en Indochine par un évêque missionnaire, monseigneur Alexandre de Rhodes qui, dans les années 1630, a adapté l'alphabet latin à la langue locale, créant ainsi le "quoc ngu", langage qui, avec l'adjonction de divers accents sur certaines lettres, a réussi à reproduire les nombreuses différences de tonalité de la langue.
En dehors de mon quart, je me promène en ville découvrant les délicieuses soupes chinoises et la bière locale. A dix heures du matin, la chemise légère que nous portons pour les sorties est déjà trempée de sueur. Il faudra s'y faire, c'est une constante dans le climat tropical du sud. Un but fréquent de nos visites est la boutique Nam Danh, à côté du marché, on l'on peut acheter du paquet de riz au poste radio. Il y a chez Nam Danh deux exquises vendeuses, Alice et Cécile, et nous passons des heures à leur faire une cour platonique sous les yeux bienveillants du patron des lieux. Alice me plaît beaucoup. Elle est très mignonne mais j'hésite à me déclarer. J'estime que cette fille n'est pas du genre à se donner au premier marin de passage. Erreur que je regretterai plus tard lorsque j'apprendrai , photos à l'appui, qu'un copain plus hardi passé après moi, avait pu bénéficier de toutes ses faveurs. En revanche, j'ai fait la connaissance de Thi-Toï, fille facile du peuple des sampans, avec laquelle je n'ai,pas le moindre complexe. Thi-Toï, bien que je n'aie pas l'exclusivité, est charmante. Pour moi, ça marche au béguin. Le service est gratuit. De plus, Thi-Toï connaissant la pauvreté de mes ressources, m'offre chaque matin une soupe chinoise et un paquet de Bastos. C'est comme ça que l'on finit par tomber dans le proxénétisme. Sa fréquentation assidue me vaut un jour une belle scène de jalousie en pleine rue de la part de la Marie.
Il ne faudrait pas oublier que nous sommes en guerre. Ce matin au marché, se déroule une exécution publique. Quatre hommes sont attachés à leur poteau. A leurs pieds, une pancarte:lanceurs de grenade. Ils sont jeunes, fiers. Le peloton de la Sûreté vietnamienne les met en joue. Les fusils claquent. Ils s'affaissent en avant: morts sans un mot.Terroristes pour les uns, héros pour les autres, ils sont une fraction des millions de leurs semblables qui vont mourir pour leur idéal, l'indépendance, laquelle lorsqu'ils l'auront obtenue à force de sacrifices, leur vaudra dans cinquante ans, de devenir l'un des peuples les plus pauvres du monde. Ironie de l'Histoire...
Photos ci dessous : de gauche à droite : Trisson, radio de la "Dévastation, votre serviteur, radio de la "Lave", Mathieu radio de la "Foudre" et sur le ponton de Canthö.