De la Place des Sept-Saints à la Place Amiral Linois.
La Ville de Brest entreprend, dès 1865, un grand projet d’urbanisme qu’elle place en tête de ses priorités : la rectification du quartier des Sept-Saints. Ce quartier est le cœur historique du Vieux Brest où évolue autant des catégories populaires que des notables et bourgeois. Les classes aisées l’abandonnent progressivement au début du XIXe siècle pour s’installer dans les nouvelles rues cossues proches du Cours Dajot, ainsi qu’à partir de 1840 autour de la toute nouvelle Place de la Tour d'Auvergne, qui a supplanté le Pont-de-Terre ; un véritable un bidon-ville au fond d’une vallée naturelle où vivait un concentré de délinquance, de filles de mauvaise vie, mais également des catégories sociales plus que modestes.
Fort de l'éradication de cette zone de non-droit a cœur de la cité, la municipalité compte bien s’attaquer à l’un des plus vieux quartiers de Brest. Au milieu du XIXe siècle, le quartier des Sept-Saints est frappé d’une insalubrité généralisée et de mœurs que la ville voudrait voir disparaître. Durant 40 ans, les travaux de démolition, d’assainissement (dans tous les sens du terme), d’élargissement des rues se succèdent et la ville dépense sans compter (façon de parler).
Les 20 dernières années de ce XIXe siècle sont consacrées à la dernière phase d’embellissement de cette partie de la ville, et non des moindre autant sur le plan des travaux, que des financements. Ainsi, le 26 mars 1888, le Conseil municipal décide de renommer la rue Haute des Sept-Saints en rue Amiral Linois. Cependant, tout reste à faire : démolir les vieux immeubles, exproprier et indemniser les propriétaires et habitants et enfin, reconstruire en plus large, plus beau, et plus sain.
De gauche à droite: la Place en 1896, au début du XXe siècle, le plan Mathon qui superpose en noir le Brest d'avant-guerre et en rouge le Brest d'après-guerre.
Cette place des Sept-Saints était, au XVIIIe siècle, un lieu très fréquenté et peuplé de populations aisées. Louise de Keroual et le Maréchal de Tourville y résidaient. Avant la rectification, la population n’est plus la même ; ce sont des catégories modestes. Au cours de la décennie 1890, un certain René Larvor habite sur cette place, tout près d’une lingère, Marie-Louise Baratchart, qui vit tout près, au 4 rue Amiral Linois. Ils se marient à Brest en 1891 (Cf "Chroniques d'un Brest disparu").
Cette place n’a quasiment pas été concernée par la rectification du quartier. Son agencement en 1896 (vue de gauche) se retrouve aisément lorsque la nouvelle rue Amiral Linois est officiellement achevée le 28 avril 1899. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, les Brestois foulaient, peut-être sans y penser, un sol témoin d’un vieux quartier aujourd’hui disparu et de pages d’Histoire que ces pavés avaient emmagasinés.