OK Larcher alors voilà !
JEANNETTE, viens ma belle ! Ah chère Jeannette !
Mascotte embarquée sur l’aviso escorteur F726 Commandant Bory. Le 17 janvier 1976, sur l’île Maurice, une bande de joyeux lurons rentraient d’une visite dans les jardins de Pamplemousse lorsqu’ils aperçurent, au loin, une scène qui leur parut pour le moins inhabituelle. En réalité, une vision d’horreur ! Un chien semblait être en train de se noyer et un autochtone, son maître sans doute, tout faire pour tenter de la sauver. C’est du moins ce que pensèrent de prime abord les matelots car, en réalité, c’était exactement le contraire. L’homme était en effet le propriétaire du chien et tentait de s’en débarrasser en le noyant. Bien malgré elle, la joyeuse équipée assistait à la scène. Lorsqu’ils comprirent ce qui était en train de se passer, les matelots décidèrent d’intervenir et s’adressèrent vertement au maître indigne. Voilà comment, ce jour là, les matelots mécaniciens du Bory se retrouvèrent à négocier, proposant d’échanger le chien contre un quart de vin rouge. La transaction fut acceptée par l’homme et tous pensèrent, avec juste raison, que c’était accorder bien peu de valeur à la vie de son chien. L’homme se saisit lâchement de la bouteille et s’en alla, laissant les marins emmener la chienne avec eux car il s’agissait d’une petite femelle. Regagnant le Bory, les matelots embarquèrent en douce l’animal pour le mettre à l’abri, le temps de décider à ce qu’ils allaient faire de lui. La discussion fut brève car c’est à l’unanimité que les mécanos décidèrent de le garder à bord. On lui chercha un maître, une sorte de référent qui s’en occuperait plus particulièrement. A bord de l’escorteur, Jeannot, le maître mécanicien, était connu pour aimer les chiens. Ni une ni deux, on fit les présentations. Ravi, le patron des bouchons gras accepta de s’occuper de la jeune chienne, décidant malgré tout et par prudence, de cacher pour un temps sa clandestine passagère. La complicité entre l’homme et la chienne était évidente et puisqu’il fallait lui trouver un nom, on opta logiquement pour Jeannette. Après quelques jours durant lesquels la nouvelle mascotte avait été maintenue au secret, le commandant Bory appareilla et gagna la haute mer. C’est seulement après cette quarantaine forcée que la petite chienne fut autorisée à paraître au grand jour, trottinant gaillardement de coursive en coursive et de poste en poste. En peu de temps, elle avait fait connaissance avec l’ensemble de l’équipage. Tous à bord adoptèrent Jeannette, même le pacha qui heureusement ne trouva rien à redire sur la présence d’une chienne sur son aviso. Le ouf de soulagement fut à la hauteur de la crainte des matelots d’être contraints de devoir se séparer de leur nouvelle amie. Officiellement reconnue comme étant la nouvelle mascotte du bord, Jeannette fut inscrite au rôle de l’équipage. Elle fut choyée et dorlotée d’autant plus intensément que son histoire douloureuse avait alimenté radio poulaines. Tous à bord n’avaient de cesse de lui rendre la vie la plus agréable possible. Unanimement, l’équipage se félicitait de l’heureuse initiative qu’avaient eue les permissionnaires en goguette d’avoir sauvé cette chienne d’une mort certaine. C’était d’autant plus vrai qu’elle allait immédiatement s’avérer être une chienne exceptionnelle. C’est sur l’aviso affecté dans les forces maritimes de l’océan Indien que Jeannette allait connaître la Polynésie française. Néophyte, elle traversa plusieurs fois la ligne équatoriale, appréciant diversement les rites de la cérémonie du baptême lors de son premier passage. Ces jours de fête n’avaient pas que du mauvais car au carré, l’ordinaire était grandement amélioré. Après sa longue campagne dans le Pacifique, l’aviso mit le cap vers Lorient où, au bassin de radoub, il fut immobilisé quelques mois pour les grandes révisions d’un Iper. Rien d’autre pour le Commandant Bory que d’aller faire peau neuve dans les infrastructures de l’arsenal de la marine. Et c’est là, à Lorient, que Jeannette fit connaissance avec la Bretagne. Enjouée et fidèle, elle se plaisait à bord comme jamais. Elevée premièrement au grade de matelot, elle gravit un à un les échelons jusqu’à être promue Major. Le carénage de l’aviso terminé, il appareilla et fit route pour participer aux patrouilles maritimes dans le Golfe lors du conflit armé qui voyait s’affronter Iran et Irak. Pour sa courageuse participation aux combats, Jeannette reçut la médaille Outre mer avec agrafe. Elle fut également décorée de la médaille de la Défense Nationale.
En fin de carrière, Jeannette avait à son actif plus de 735 000 nautiques de navigation. Originaire de l’île Maurice, aimée et appréciée de tous, elle quitta le Bory peu de temps après avoir revu sa terre natale. Après une carrière d’exception sur l’aviso escorteur, Jeannette s’en alla le 19 août 1989. Bien triste jour que celui de son départ vers d’autres cieux. Ce jour là, l’équipage fut orphelin de sa petite mascotte. Une irréparable perte ! Partout, du pont principal à la passerelle de navigation, des postes équipages aux cuisines, des machines aux cambuses, l’ombre de Jeannette planait partout. Le manque était à la mesure de l’affection que tous lui portaient. Le magazine Cols bleus ne s’y est pas trompé lorsque dans ses colonnes, il rendît un vibrant hommage à Jeannette dans les termes suivants :
Le 19 août 1989, s’est éteinte avec elle l’une des plus lointaines traditions de la marine. Elle était l’une des dernières mascottes embarquées sur les bâtiments de la marine nationale.
Jeannette fut effectivement parmi les toutes dernières mascottes embarquées. Elle demeure certainement le plus beau souvenir des marins du Bory qui côtoyèrent chaque jour cette chienne exceptionnelle qui fut, un beau jour, sauvée des eaux. Adieu donc, Jeannette, et merci !
Avant Jeannette, un adorable petit chien répondant au nom de Pilou, avait également servit à bord de l’aviso. Il laissa également à tous ceux qui l’ont côtoyé, un souvenir qui ne s’est ni jamais ni démenti, ni effacé.
MAPPIE.
Mascotte de la station radio Rivière Salée et Pointe des Sables. Avenante et de caractère facile, le chienne n’était agressive qu’avec les gens de couleur et ceux dont elle considérait qu’ils n’avaient rien à faire dans le poste de transmission. Lors de la construction de l’aile perpendiculaire de la station, un chef de chantier en fera la triste expérience. Bonne pâte, la plupart du temps, Mappie n’était pas peu fière de partir se promener avec ses bienfaiteurs pour faire avec eux l’inspection des clôtures de la station. Elle semblait être là comme à la parade. La tête haute, presque dédaigneuse à l’endroit des autres chiens qu’elle rencontrait sur la route. Pas un habitant, pas un chien n’osait alors l’approcher. Chien-Chien,Toutoune et Mégot furent également mascottes de la station radio.copyright Skagerrac