Je suis élève interne à « la Prat’s » École pratique de commerce et d’industrie, puis Collège technique aujourd’hui Lycée.
Ce 6 juin 1944, il est 07h30 environ, comme tous les matins je me poste à l’angle d’un bâtiment d’où on fait face à l’entrée de l’école par où arrivent nos copains externes, notre seul lien avec l’extérieur.
Tout à coup je vois apparaître mon ami, Georges Duplessis dit Pépé, (plus tard il fera l’Aéro lui aussi) qui court comme un dératé en criant aussi fort qu’il le peut : LES ANGLAIS ONT DÉBARQUÉ !!!
Nouvelle qu’il vient d’entendre chez lui à la radio et qu’il veut être le premier à l’annoncer à ses camarades internes.
A quelques secondes d’intervalle il est suivi par d’autres élèves tout autant excités.
L’ensemble de la « prat’s » s’enflamme, tout le monde crie de joie et chante des refrains patriotiques.
Les professeurs et les pions nous contemplent ravis eux aussi.
Nous ne sommes guère prudents car même s’ils ne sont pas à Cluny en ce moment les Allemands ne sont pas très loin à Macon.
Nous nous souvenons tous d’un passé très proche, le 14 février de cette année, où après avoir mis la ville en état de siège ils ont embarqué et déportés 64 résistants parmi lesquels se trouvait Mlle Zimberlin, prof de français et d’Anglais qu’ils sont venus arrêter dans les murs de la « Prat’s ».
Mais la joie causée par la nouvelle du débarquement est la plus forte : les profs comme les pions y compris le surveillant général Doridon dit le le poinche », la terreur des élèves, un vrai bidel de marine, seraient impuissants à rétablir un semblant de discipline…
Il serait trop long de vous conter le déroulement de cette journée mémorable pour les gens de ma génération.
On ne fait plus grand cas aujourd’hui du débarquement des Alliés en Normandie.
J’ai cependant voulu l’évoquer aux ACB pour saluer la mémoire de tous ces jeunes hommes des forces alliées qui ont combattu et qui sont morts, par milliers ce jour là pour notre liberté.