En 1949, les planificateurs militaires américains se rendirent compte qu'ils n'avaient pas suffisamment d'informations sur l'emplacement, les capacités et les caractéristiques techniques globales des systèmes radar du bloc sino-soviétique. En outre, comme l'Union soviétique participe maintenant au développement et à l'essai d'armes de haute technologie, telles que les missiles sol-air, et en conséquence, au début de 1950, la collecte de renseignements électroniques sur ces systèmes est devenue une priorité. Un programme de collecte aussi ambitieux nécessitait cependant un équipement électronique raisonnablement sophistiqué. Malheureusement pour les États-Unis, la plupart des équipements construits pour effectuer des reconnaissances électroniques pendant la Seconde Guerre mondiale ont été vendus à des marchands de déchets et de surplus. Un besoin renouvelé de reconnaissance électronique.

Quand il a été décidé d'équiper deux escadrons de patrouille pour mener la mission de reconnaissance électronique, la Marine a constaté qu'elle ne disposait pas des équipements nécessaires. La Marine a alors envoyé deux techniciens électroniques en chef pour localiser et racheter une partie de l'équipement qui avait été précédemment vendu en surplus. Portant des vêtements civils et transportant de grosses sommes d'argent, les deux chefs fouillèrent dans les magasins de surplus de guerre de New York. Ils achetèrent tous les récepteurs d'interception, les radiogoniomètres, les analyseurs d'impulsions et tout autre équipement de reconnaissance électronique qu'ils pouvaient trouver. Ces équipements ont ensuite été réparés par des techniciens de la Navy et installés sur les Privateer afin d’effectuer les missions de reconnaissance électronique de haute priorité ou Ferret (terme utilisé officieusement par les équipages de la Marine) à la périphérie des pays communistes, en particulier la Russie.

Les principales zones d'opération pour les versions de reconnaissance électronique des PB4Y-2 du VP-26 étaient le survol des mers de la Baltique et de l'Adriatique, avec des missions dirigées contre les installations radar soviétiques. Les corsaires « électroniques » de l'escadron opéraient depuis Port Lyautey sous le prétexte de servir d'avions de liaison et messagerie pour les ambassades et missions américaines à travers l'Europe, la Scandinavie et l'Asie occidentale. Les équipages de Privateer ont commencé alors à effectuer des reconnaissances électroniques de routine à l'appui de leurs missions de surveillance anti-sous-marine et de surveillance de surface dans les zones définies. Les Soviétiques se livrèrent alors à plusieurs attaques contre des avions de patrouille « normaux » au cours des années 1950.

La première perte d’un appareil de reconnaissance électronique de la Marine américaine survint le 8 avril 1950. Le 8 avril 1950, un appareil du VP-26, le PB4Y-2 BuAer 59645, après avoir décollé de Wiesbaden pour une mission de reconnaissance au-dessus de l’Allemagne, disparaît avec ses dix membres d’équipage à 80 nautiques au sud-est de l’île de Gotland, dans la mer
Baltique. Les rapports concluent à une attaque sans sommations menée par des chasseurs soviétiques. L’avion et son équipage de dix hommes furent perdus dans la mer Baltique occidentale, apparemment après avoir été attaqués par des avions soviétiques à environ 80 nautiques au sud-est de l'île Gotland. Ce PB4Y-2 abattu le 8 avril 1950 au-dessus de la Baltique devint la première victime de la "Guerre froide électronique". Le sort de son équipage de dix hommes n'a jamais été confirmé, mais on soupçonne que certains d'entre eux ont été emprisonnés en Russie. En janvier 1955, deux Américains ont été rapatriés des camps de prisonniers soviétiques où ils avaient été détenus.

En juin 1950, l'escadron fut rebaptisé VP-HL-6, puis VP-26, et un détachement permanent de Privateer PB4Y-2 fut maintenu à Port-Lyautey.

En milieu de l’année 1951, le Patrol Squadron VP-26 et son état-major quittent Port-Lyautey pour les États-Unis, en laissant sur la base trois PB4Y-2 avec leurs équipages et un échelon de personnel d’entretien. Ces éléments forment une nouvelle unité baptisée NAF Patrol Unit directement rattachée au commandement des Naval Air Activities ; elle est chargée de poursuivre les missions de reconnaissance électronique sur le théâtre européen.

Au mois de juin 1952 , les nécessités de la Guerre Froide poussent les États-Unis à renforcer leurs moyens de détection au-dessus de l’Europe. Les PB4Y-2 Privateer de la NAF Patrol Unit sont remplacés par quatre Martin P4M-1Q Mercator, sur un total de dix prévus à l’armement. Ce gros bimoteur, conçu spécialement pour la patrouille maritime, candidat malchanceux auquel l’US Navy a préféré le Lockheed P2V Neptune pour le renouvellement de sa flotte aérienne ASM, a été construit en vingt exemplaires. Ses caractéristiques font un bon appareil de reconnaissance électronique, il est équipé d’un radar AN/APS-33 et de nouveaux moyens de détection : récepteurs d’interception radar avec analyseurs d’impulsion associés, brouilleurs et équipements d’interception de communications et de contre-mesures. Il est également pourvu d’un armement défensif lourd ; une tourelle de nez Emerson avec deux canons de 20 mm couplés, une tourelle de queue Martin avec également deux canons de 20 mm couplés, plus une tourelle dorsale Martin avec deux mitrailleuses de calibre 12,7 mm. Le grand rayon d’action de l’appareil (4 500 km) va permettre à l’escadron d’opérer directement à partir de Port-Lyautey vers les confins du bloc d’Europe de l’Est, en particulier en Adriatique, en Mer Baltique, en Mer Noire et jusqu’au long de la frontière Turque.
Le 2 juillet le P4M-1Q, BuNo 124371, se pose en mer au large de Chypre ; le Lt. Robert B. Bager et 17 membres d’équipage sont sauvés.

En mai 1953, l’unité de reconnaissance NAF Patrol Unit devient un détachement de l’Early Warning Squadron Two, VW-2, nouvellement créé à la NAS de Patuxent River, désigné Det A ; le détachement poursuit les mêmes missions de renseignement électronique que les précédentes.

Le 1er septembre 1955, le squadron VW-2 est renommé VQ- 2. Il adopte le bigramme JQ sur la dérive. Il est toujours armé de P4M-1Q Mercator. Son effectif total comporte 24 officiers et 78 hommes du rang, tous spécialistes de la reconnaissance électronique.

En juillet 1956, les pilotes du Fleet Reconnaissance Squadron VQ-2 commencent une formation de familiarisation à Patuxent River, Virginie, sur avion à réaction Douglas A3D-1Q Skywarrior ; en septembre les deux premiers appareils sont convoyés à Port-Lyautey et le 6 décembre, un A3D-1Q effectue sa première mission opérationnelle. Ainsi, le VQ-2 possède deux types
d’appareil : les Mercator et les Skywarrior.

En février 1957, les Martin P4M-1Q Mercator et les A3D Skywarrior sont renforcés par des Lockheed P2V-5FS Neptune ; ce modèle est caractérisé par un nez à tourelle et des turbines J34 sous les ailes ; l’équipement électronique fait appel à l’AN/APS-20, à l’AN/APS-8 et au système ASM Julie-Jezebel ; le détecteur MAD remplace la tourelle arrière.

A la fin octobre 1958, en prévision du désengagement de ses bases au Maroc, l’US Navy décide de déplacer le Fleet Reconnaissance Squadron VQ-2 vers la Naval Station de Rota en Espagne ; le départ des appareils (P4M-1Q,A3D et P2V-5F) et du personnel s’échelonne entre le début novembre et la première quinzaine de janvier de l’année suivante.