Heureusement pour le singe, la mascotte du bord n’était pas du genre jaloux.
Très entouré en effet, l’émigrant nippon faisait l’admiration de tous.
Il fut donc décidé de le garder et d’en faire la seconde mascotte du bord.
Affecté au poste deux du service artillerie, il fallut peu de temps au primate pour y prendre ses habitudes.
Puisqu’il semblait se plaire sur le Charner, les armuriers se mirent en quête de lui trouver un nom.
Quoique la chose ne fût pas très difficile, elle fut sujette à controverse.
Il se trouvait en effet à bord quelques marins farceurs et taquins qui, pour se moquer de la forte pilosité de l’adjudant, ne trouvèrent pas mieux que de baptiser le singe Lulu.
Joueur quoique très effronté et frondeur, l’apprivoisement ne se fit pas sans quelques difficultés.
Patient et attentif, l’équipage s’attacha peu à peu au macaque qui finit par se calmer.
Pour avoir compris qu’il ne risquait rien, il commença à s’associer à la vie du bord.
C’est ainsi qu’il répondait présent à l’appel, faisait le quart à la coupée et participait aux postes de propreté.
A l’occasion, il se risquait même à quelques petits travaux de peinture.
Évidemment le gris dominait à bord, mais il lui préférait le rouge.
Apercevant les contenants, il y trempait ses pattes et courait tous azimuts sur le pont autour de la tourelle.
Une course poursuite s’engageait alors pour le punir, mais les matelots capitulaient et s’avouaient vaincus face à la maestria de Lulu pour leur échapper.
La peinture effacée, le singe revenait et était vite pardonné.
Il ne manquait jamais l’heure des repas au cours desquels on consentait à lui donner quelques reliefs du menu qui avait été servi.
Comme toute mascotte qui se respecte, Lulu appréciait nécessairement l’ordinaire du bord.
Chaque matin après l’appel, la relève de huit heures lui apportait sa pitance.
Il se régalait alors principalement de bananes et d’oranges.
Mais à toute nourriture dont on le gratifiait, il préférait les gâteaux apéritifs, les fruits secs et les cacahuètes.
Gavé, il faisait alors quelques réserves dont il se remplissait à foison les bajoues.
Défiguré, ce n’était plus d’un singe qu’il s’agissait mais d’un hamster.
Il désertait parfois le poste des armuriers pour visiter, l’un après l’autre, ceux des autres spécialités.
Visites au demeurant très amicales, excepté le fait que Lulu n’était pas toujours le bienvenu. Il s’y rendait en effet à n’importe quelle heure.
Le jour cela ne dérangeait pas grand monde seulement voilà, il s’y aventurait aussi la nuit et là, c’était une autre paire de manches.
Combien de matelots furent ainsi réveillés par l'embarrassant petit macaque ?
Il investissait leurs bannettes et se glissait sans crier gare sous les draps pour n’en plus bouger.
Drôle de branle-bas !
On imagine l’agacement du matelot qui avait prit soin de se coucher tôt alors qu’il devait prendre son quart au zérac.
Si Lulu était farceur, il était également colérique.
Il ne supportait pas de se faire, certes gentiment, mais fermement rabrouer.
Finalement, que lui importait les réprimandes puisqu’il était toujours pardonné et ça, ce bougre de singe le savait parfaitement.
Au service à la mer, il avait pour habitude de se tenir assis sur l'alidade de la couronne de veille ; stabilisée s’entend.
Il avait une autre détestable manie.
Comme dans chaque poste trônait généralement un lecteur de cassette, il était toujours intrigué par la musique qui en sortait et à laquelle il ne comprenait évidemment rien.
Le poste déserté par les matelots, son grand plaisir était d'ouvrir le compartiment du lecteur, d’en extraire la cassette et d’en dérouler méthodiquement la bande magnétique.
On imagine sans peine la ire du propriétaire lorsqu’il revenait à son poste.
Sportif accompli, un matelot lui apprît à nager.
S’il ne détestait pas être douché, il n’était pas non plus contre quelques bonnes petites séances de massages.
Habituellement propre, il arrivait cependant qu’il s’oublie.
Nouvelle corvée pour son mentor que de devoir lui nettoyer les fesses sous le robinet.
S’il détestait se faire ainsi tripoter l’arrière train, Lulu aimait a contrario les séances de déguisement.
On lui enfilait en effet quelques vêtements de poupées, costumes dont on se demandait qui avait bien pu les introduire à bord de l’Aviso.
Ce Lulu, un rien l’habille !
Profitant des escales, le jeune macaque affectionnait partir en bordée pour aller se dessaler en compagnie des matelots armuriers.
Pour être un compagnon agité et prompt à se commettre en mille facéties voire s’oublier n’importe où, l’équipage du Charner était néanmoins profondément attaché à lui.
Rex, Pollux et Sammy furent les officielles mascottes de l’Amiral Charner.
Pollux embarqua en 65, Rex en 69 et Sammy en 74.
REX, le vieux loup de mer !
Mascotte de l'Aviso Escorteur Colonial F727 Amiral Charner, de 69 à 73.
Ce chien au caractère bien trempé, d’une patience et d’une gentillesse à toute épreuve, détenait un record.
Il était le membre d’équipage le plus âgé du bord.
Autre particularité et non des moindres, le quartier-maître de seconde classe Rex était une station météo à lui tout seul.
Invariablement, dès que le temps changeait, ou allait changer, il descendait à la machine.
Jamais il ne fut pris en défaut et sa carrière maritime durant, le chien ne se trompa jamais sur ses prévisions.
Peu avant sa mise à la retraite, alors que le bâtiment faisait escale au Japon, un nouveau venu fit son apparition sur l'Amiral Charner.
Rien moins qu’un minuscule macaque que tous baptisèrent affectueusement Lulu.
En 74, c’est lors d’un carénage à Lorient que Rex fut débarqué pour une retraite largement méritée.
Peu de temps après, Sammy fit son apparition sur l’aviso, pas peu fier de passer la coupée en compagnie du premier-maître électricien d’armes.
Lors, le beau Sammy honora l’équipage de sa présence à bord.
Tout comme Rex, il prît très à cœur son rôle de mascotte du prestigieux bâtiment colonial.
Avant Rex et Sammy, Pollux avait été mascotte à bord de l’Amiral Charner.
Embarquée en 65, ce chien au pelage noir et blanc resta à jamais dans la mémoire de l’équipage.
SAMMY
Mascotte à bord de l’Aviso Escorteur Colonial F727 Amiral Charner.
En 74, après la mise à la retraite de Rex, la mascotte qui l’avait précédé, Sammy fit son apparition à bord en compagnie du premier-maître Elarm.
Le Charner était alors en cale de radoub, immobilisé pour un grand carénage au sein des infrastructures de l’Arsenal maritime de Lorient.
Avant Sammy, Pollux et Rex furent les mascottes embarquées sur le fier vaisseau.
La première y embarqua en 65, la seconde en 69.
Skagerrac